DEWINTER Ann
© Photo Couillaud Pascal
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Prochain roman "Les sceaux du document perdu" sortie en mars 2016
SUD-OUEST 25 AOUT 2015
Le Triangle de l'effroi ». Voilà un titre qui en dit long sur la thématique du livre. On est ni dans Pierre Teilhard de Chardin, ni dans Paul Valéry. On est dans Ann Dewinter, auteur rétaise qui a décidé de s'attaquer à un genre littéraire de plus en plus couru : le polar local. « En fait, je ne l'ai jamais visité, mais le commissariat de La Rochelle, ce grand bâtiment au cur de ville, m'inspire. De même que les fortifications. D'autant qu'on en retrouve un peu partout autour de La Rochelle. A Fouras, Brouage, dans l'île de Ré. J'aime aussi les souterrains, ils renferment tant de mystères. » Elle a créé un personnage central, le commissaire Gelex, qui la suit dans tous ses romans, y compris dans son petit dernier « Le Triangle de l'effroi » où les cadavres rythment les pages. Un peu comme chez Pierre-Alain Mageau, autre auteur de polars ancrés en Aunis, qui multiplie les enquêtes policières dans les faubourgs rochelais à une cadence infernale. Il en est à son 26e thriller et s'il a étendu ses intrigues au département, il reste lui aussi fidèle à son commissaire Joubert, basé place de Verdun. Le commissaire écrivain
À propos de commissaire, il en est un qui le fut réellement : Jacques Berlioz-Curlet. Piqué par le virus de l'écriture, l'ex-patron de la police rochelaise avait commis lui aussi un polar « Vengeance tardive » avant de se lancer plutôt dans les chroniques historiques.
Le Rétais Robert Béné n'est pas moins prolixe. Depuis vingt-six ans, il creuse le sillon de son île pour y planter le décor de ses intrigues policières : « Pluie de diamants au large de Ré », « Fleurs de diable sur Ré la Blanche » Sa terre l'inspire tout autant que le caractère particulier des Rétais. Faut-il voir dans le fait que le père du roman policier français, Émile Gaboriau est originaire de Saujon, tout près d'ici, ou que Georges Simenon a écrit quelques-unes de ses plus belles pages dans le Pays rochelais ?
« On est forcément tous en admiration devant la puissance d'évocation de Simenon. C'est une référence. Mais j'ignore s'il a suscité des vocations, ici à La Rochelle », commente Ann Dewinter.
« Dans le roman policier, il y a tout un éventail de styles : le noir, le gore, le cabalistique, l'étrange, le psychologique, le social. Chacun y trouve son genre. Pour ma part, j'ai dévoré Georges Simenon et Agatha Christie », poursuit la Rétaise. Tout comme Pierre-Alain Mageau qui a enregistré avec malice le message suivant sur son répondeur : « Vous êtes bien sur le répondeur téléphonique d'Agatha Christie et de Georges Simenon ».
Les rues à arcades du « Fantôme du chapelier », la brume portuaire du « Voyageur de la Toussaint » ou l'austérité des hôtels particuliers du « Testament Donnadieu » ont-ils irrigué le cerveau des écrivains de l'Aunis à leur insu jusqu'à les guider dans la construction de leurs intrigues ?
« J'ai toujours un peu écrit. Mais c'est quand je me suis retrouvée clouée sur un lit d'hôpital à la suite d'un grave accident que j'ai compris qu'il me fallait être mobile dans ma tête pour continuer à vivre. J'ai donc commencé à écrire ». De la lecture à l'écriture, Ann Dewinter a suivi la piste de ses enquêtes comme si cela coulait de source. Fort de son expérience de psychanalyste, Pierre-Alain Mageau exploite plutôt le filon des profilers. Robert Béné celui de l'histoire et du patrimoine. Chacun sa façon de narrer. Mais tous se réfèrent au maître Simenon.